On ne fait pas un voyage. Le voyage nous fait et nous défait, il nous invente.
Courir le monde de toutes les façons possibles, ce n'est pas seulement la découverte des autres, mais c'est d'abord l'exploration de soi-même, l'excitation de se voir agir et réagir. C'est le signe que l'homme moderne a pris conscience du gâchis qu'il y aurait à rendre passive une vie déjà bien courte.
Le plus beau voyage, c'est celui qu'on n'a pas encore fait.
Naturellement, les voyages autour du monde ne sont pas aussi agréables qu'ils le paraissent. C'est seulement quand vous avez fui toute cette horreur et toute cette chaleur que vous en oubliez les désagréments et que vous vous souvenez des scènes étranges que vous avez vues.
A quoi sert de voyager si tu t'emmènes avec toi ? C'est d’âme qu'il faut changer, non de climat.
Lorsque tu voyages, tu fais une expérience très pratique de l'acte de renaissance. Tu te trouves devant des situations complètement nouvelles, le jour passe plus lentement et, la plupart du temps, tu ne comprends pas la langue que parlent les gens. Exactement comme un enfant qui vient de sortir du ventre de sa mère. Dans ces conditions, tu te mets à accorder beaucoup plus d'importance à ce qui t'entour parce que ta survie en dépend. Tu deviens plus accessible aux gens car ils pourront t'aider dans des situations difficiles. Et tu reçois la moindre faveur des Dieux avec une grande allégresse, comme s'il s'agissait d'un épisode dont on doit se souvenir sa vie restante.
Le vrai domicile de l'homme n'est pas une maison mais la route, et la vie elle-même est un voyage à faire à pied.
Voyageur. Bah ! Ceux qui ont fait le tour du monde peuvent faire durer leur conversation un quart d’heure de plus.
Il meurt lentement, celui qui ne voyage pas, celui qui ne lit pas, celui qui n’écoute pas de musique, celui qui ne sait pas trouver grâce à ses yeux.
Toutriste : voyageur parti à l’aventure, et auquel il n’est absolument rien arrivé.
Alain Finkielkraut, Petit fictionnaire illustré, Éditions du Seuil, 1981